L’éruption du 17 juillet au 8 août 2001
Je n’oublierai jamais d’avoir assisté en spectateur privilégié au paroxysme du 24 juin 2001 offert par cet intermittent de spectacle hors du commun. Un show progressif de trois heures sans rappel qui s’est ensuite renouvelé à intervalles irréguliers jusqu’au matin du 17 juillet, avec les mêmes caractéristiques, signant par la même occasion son 17eme et dernier paroxysme de l’année 2001.
Mais l’Etna n’avait pas dit son dernier mot, il a décidé d’un poing rageur de marquer à sa manière le début du XXIe siècle.
Le 13 juillet, les appareils de surveillance s’affolent soudainement, des milliers de secousses sont enregistrées par les stations. Des symptômes bien différents de ceux précédant les paroxysmes, ils annoncent sans doute une activité beaucoup plus importante. En effet, le 19 juillet vers 22h30, le verdict tombe, un imposant panache s’élève tout à coup du Piano del Lago à 2500 m, un cône est en train de naître. Des flots de lave s’échappent aussi d’une fracture à 2100 m juste derrière la station sud de Sapienza. Ce n’est pas tout, au total sept points d’émissions plus ou moins importants situés sur la rift zone Nord et Sud marqueront cette éruption mémorable.

(Photo : André Laurenti)
En route vers l’Etna
Je ne pensais pas revoir l’Etna de sitôt, je venais tout juste de reprendre mon travail et me voilà à nouveau en train de préparer mon sac et repartir en direction de la Sicile.
Depuis le 18 juillet l’activité a totalement changé et s’est considérablement amplifiée, à tel point que les autorités ont décrété l’état d’urgence.
Le déplacement vers la Sicile se fera cette fois en Land-Rover depuis le midi de la France en compagnie d’Elisabeth et Luc fondateurs de l’association Vulcain des amies de Maurice et Katia Krafft. La descente vers le sud a été, certes éprouvante, mais fort heureusement la récompense était au rendez-vous et valait bien ce sacrifice.

(Photo : André Laurenti)
Vendredi 27 juillet 2001
Très vite, nous prenons contact avec notre fidèle ami Giuseppe, « Pippo » pour les intimes, il est d’ailleurs, particulièrement sollicité depuis le commencement de l’éruption. A 18h nous nous réunissons dans son appartement d’Acireale. D’autres collègues, tous membres de L’Association Volcanologique Européenne (L.A.V.E.) sont au rendez-vous, dont Alain membre fondateur et secrétaire, Gilbert, Christian. Ils sont venus de toutes parts, tous impatients et prêts à partir vers de nouvelles aventures sur l’Etna. Le groupe de neuf personnes se répartit en trois véhicules et le petit convoie prend la direction de la station de Sapienza (Etna Sud) par la route de Zafferana. Nous nous heurtons à un premier barrage, seul Pippo a l’autorisation de passer. Certes, nous obtiendrons les papiers nécessaires le lendemain, mais ce soir là, il fallait coûte que coûte trouver une solution pour passer. Nous finissons par déjouer l’attention des carabiniers en contournant discrètement à pied par la forêt le barrage, et cela malgré la présence de chiens d’une propriété environnante qui, les bougres, nous avaient repéré et n’arrêtaient pas d’aboyer. Heureusement l’obscurité de la nuit nous rend peu visible. Après un véritable parcours de combattant, nous débouchons plus haut sur la route. Nous retrouvons enfin Pippo, il effectuera plusieurs voyages pour amener l’équipe au complet sur le site tant convoité.
Nous montons nous poster au nord-est du cratère Silvestri supérieur derrière la station de Sapienza. Le spectacle est saisissant, au dessus de nos têtes une fracture s’est ouverte dans la nuit du 17 au 18 juillet. Celle-ci forme une boutonnière appelée pour le moment « Silvestri 4 », elle se compose de trois bouches actives situées à environ 2150 m. Une bouche éructe sans cesse tandis que les deux autres se manifestent par intermittence. A partir de cette boutonnière un véritable torrent de feu descend tout droit, évoluant en fonction du relief, puis part vers l’ouest presque en angle droit, en contournant le cône du « Silvestri Supérieur » sur lequel nous nous trouvons.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)


(Photo : André Laurenti)


La lave descend ensuite à l’est de la station de Sapienza, coupe la route 92 menant à Zafferana en passant très prêt de deux restaurants et dévale pleine pente le long du flanc ouest des cratères « Silvestri inférieurs » en direction du Sud.
Au niveau de la station, la coulée s’élargit sur un replat, elle atteint à cet endroit une cinquantaine de mètres de large.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Au bord de cette coulée on observe de nombreuses enclaves siliceuses et sableuses probablement arrachées au soubassement sédimentaire du volcan. Il s’agit de lambeaux de sable blanc pris dans la gangue de magma et vitrifiés sur une faible épaisseur au niveau de la zone de contact. Un bel échantillon enrichira ma collection de roches volcaniques.

(Photo : André Laurenti)
Le lendemain matin, à la station de Sapienza, d’importants moyens matériels sont entrés en action. Nous observons le balais incessant des engins de chantier, pelles mécaniques, percuteurs, bulldozers et camions. La protection civile et l’armée italienne s’affairent nuit et jour pour tenter de canaliser la lave en édifiant des digues de terre et de roche. Le but étant de protéger les bâtiments de la station en évitant que la coulée s’élargisse et les détruise. L’opération semble efficace, mais rencontre parfois des difficultés. En effet, par moment des débordements se produisent, des blocs incandescents viennent stopper leur course contre les murs des constructions, les pompiers veillent et arrosent la roche en fusion pour la refroidir et limiter les dégâts.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Sur un promontoire élevé à l’abri des coulées, de nombreuses chaînes de télévisions couvrent l’événement et attendent aussi l’entrée des coulées de lave dans Nicolosi. Si les médias présentaient une situation alarmiste, cela n’inquiétait pas trop les habitants. En effet, le front de lave ne progresse plus vraiment, il a atteint une zone plate et a tendance à se refroidir. Finalement la coulée stoppera sa course au bord des carrières à 4 km de la ville.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Situation au Piano del Lago
L’activité derrière la station de Sapienza n’est pas la seule, plus haut au Piano del Lago (alt. 2500 m) à la base du cône de la Cisternazza, de nombreuses fractures parallèles sont apparues et se dirigent en direction du sud traversant la piste et passant de chaque côté de la Montagnola. Le 17 juillet à 7h30 une forte secousse est ressentie à la station de Sapienza. Au même moment une nouvelle fracture s’ouvre au pied du Sudestino (cratère Sud-Est) à 3000 m en direction du Sud et libère des fontaines de lave. En fin d’après midi une nouvelle bouche se forme entre 2700 et 2800 m d’altitude rejetant des fragments de lave et d’importantes coulées de lave. Le 19 juillet, peu avant 18h, un cratère extrêmement explosif se forme. En trois jours d’éruption il atteindra une hauteur de 100 m, c’est celui qu’on appellera le « Laghetto ». Dans la nuit du 25 au 26 une ouverture se produit sur le flanc sud de ce cône, libérant la lave qui descend sur l’arrivée du téléphérique. La coulée s’appuiera sur le mur nord du bâtiment sans pénétrer à l’intérieur, brûlant une partie du toit. Elle continuera sa course et se séparera en deux bras dont l’un rejoindra la coulée générée par le Sylvestri 4. Le 28 juillet les puissantes explosions ont projeté des bombes de plusieurs m3 suffisamment loin pour atteindre le bâtiment du terminal du téléphérique endommageant sérieusement la construction.

(Photo : André Laurenti)
28 juillet montée au Laghetto
Cette après midi nous avons rendez-vous avec Pippo au restaurant la « Nuova Quercia », nous rejoignons aussi Boris Behncke volcanologue à l’I.N.G.V. de Catane. Boris accorde quelques interview à la presse et nous partons tous ensemble pour se rendre au Laghetto. Une équipe de télévision de la CNN est aussi de la partie soit un groupe de plus de quinze personnes. Nous nous rendons en voiture sur le site de l’observatoire d’astrophysique proche du cratère Monte Vetore à 1700 m d’altitude, juste en aval de la station de Sapienza. Nous nous préparons en chaussant les godillots de montagne, en mettant les guêtres et des gants de protection sans oublier le casque dans le sac à dos. Puis nous démarrons l’ascension à l’écart une fois de plus des carabiniers et avec plus de 1000 m de dénivellation. Boris et Pippo mènent la marche à une allure soutenue gravissant les pénibles coulées anciennes aux blocs instables et coupants. L’absence de chemin rend la montée peu aisée, si bien qu’à mi parcours l’équipe de télévision abandonne, plus haut d’autres personnes rebrousserons chemin. La montée n’est pas toujours directe, il faut tenir compte des coulées actives en les contournant. Après quelques brefs arrêts pour se restaurer notre groupe fortement réduit se trouve enfin en tête à tête avec un « Laghetto » en pleine forme.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Les éruptions en coup de canon sont extrêmement puissantes faisant vibrer le sol. Le choc d’une explosion fera d’ailleurs tomber ma gourde posée à même le sol. Par moment, en dehors du cratère actif au sud et au nord du cône, de violentes explosions phréato-magmatiques avec des jets cypressoïdes caractéristiques, projettent des blocs dans toutes les directions, prudence nous restons à distance. A l’emplacement du Laghetto, il n’était pas rare de voir se former à la fin du printemps, lors de la fonte des neiges un petit lac, d’où le nom de « Piano del Lago ». Ainsi, le magma montant vaporise ces eaux d’infiltration provoquant ce type d’explosions imprévisibles et dangereuses.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Au cours de la nuit une activité strombolienne plus spectaculaire prend le relais.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Nous quittons les lieux tard dans la nuit, la descente dans les blocs instables est longue et harassante. En arrivant à notre véhicule, je n’ai même pas envie de manger, je me faufile directement dans mon duvet et m’endors aussitôt.
Au petit matin, je suis réveillé par une voix murmurant à peine « mais c’est André ? », il s’agit de connaissances de l’association Lave attirées eux aussi par les tribulations de l’Etna. Je me rends compte alors, que je me suis endormi carrément au beau milieu du chemin.

(Photo : André Laurenti)
Le soir nous choisissons le lieu pour dormir en fonction de la direction du panache de cendre, soit l’observatoire à l’ouest, soit le « Renard » à l’Est. Malgré ces précautions, tous les matins je me réveille recouvert de particules fines.
Le 31 juillet nous montons sur les coulées observer leur progression vers l’ouest.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
L’activité semble enfin s’essouffler. A la station de Sapienza on a limité les dégâts et évité le pire.
Le 8 août l’Etna s’accorde une période de repos, mais jusqu’à quand ?
Malgré la saison estivale bien entamée, il faudra penser à la reconstruction notamment celle du téléphérique, de ses installations et réaménager aussi la station de Sapienza bien embarrassée par l’épaisseur de lave la traversant et qui a modifiée la topographie.

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)

(Photo : André Laurenti)
Au cours de cette éruption, la lave a recouvert une superficie d’environ 5,5 km2 soit trente millions de m3 de magma. Le trafic aérien a également été perturbé par les nuages de cendre, l’aéroport international de Catane a été fermé à plusieurs reprises.
Bonjour, l’an dernier j’ai grimpé le Vulcano (je conseille vivement : 1h30 de montée pour une vue associant cratère sulfure9 et panorama des îles éoliennes, en gros enfer et paradis) et partiellement l’Etna (pas pu finir dans la journée, car à pied dès le parking sur un sentier raide apparemment pour les vulcanologues, avec des trappes de capteurs de surveillance ). Cette anne9e, je fais le Stromboli et j’espère voir le sommet de l’Etna, mais j’aimerais éviter de prendre le bus 4 4. Est-il possible de monter/descendre dans la journée (sans faire tout le tour du sommet ), après avoir pris le téléphérique ? Est-ce autorise9 sans guide ? Sinon, peut-on rejoindre un guide pour la montée finale apre8s avoir fait la partie bus 4×4 à pied ?Par ailleurs, j’ai trouvé une reproduction d’un ticket indiquant 3 euros pour le téléphérique, 38 euros pour les bus 4×4 et 7 euros pour le guide, soit 48 et non 60 euros ?